Vers une protection renforcée des lanceurs d'alerte

Un «niveau élevé de protection». C’est l’engagement ressorti hier de l’accord provisoire issu du trilogue relatif aux lanceurs d’alerte signalant des infractions au droit de l’Union. Rapporteur parlementaire, Virginie Rozière (S&D, FR) reconnaissait avoir «dû batailler fort pour que le texte final soit à la hauteur des attentes» tout en se félicitant d’être parvenue à obtenir un texte ambitieux, couvrant un large éventail de domaines du droit de l’Union, notamment en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, de fiscalité des entreprises, protection des données, protection des intérêts financiers de l’Union, sécurité des denrées alimentaires et des produits, protection de l’environnement ainsi que de sûreté nucléaire.

Entre autres avancées concrètes, le texte met en place des «canaux de signalement sûrs». Plus simplement, et sur le plan procédural, les lanceurs d’alerte sont encouragés à signaler l’infraction d’abord au niveau interne, si celle-ci peut être effectivement traitée au sein de leur organisation et s’ils ne risquent pas de subir des représailles. Ils peuvent également signaler l’infraction aux autorités compétentes s’ils le jugent nécessaire, en fonction des circonstances de l’espèce. Si aucune mesure appropriée n’est prise après le signalement aux autorités et en cas de danger imminent ou manifeste pour l’intérêt public, ou si le signalement aux autorités n’avait aucun effet, par exemple parce que ces autorités sont de connivence avec l’auteur de l’infraction, les lanceurs d’alerte pourraient alors révéler publiquement l’infraction, y compris dans les médias. Ceci, tout en bénéficiant d’une protection nouvelle et effective, le texte incluant des garanties contre la suspension, la rétrogradation, l’intimidation ou d’autres formes de représailles. Une protection, point non moins important, s’étendant également aux personnes qui aident les lanceurs d’alerte (facilitateurs, collègues, familles et journalistes d’investigation). Les États membres, au regard du contenu de l’accord, devront parallèlement, quant à eux, fournir aux lanceurs d’alerte des informations exhaustives et indépendantes sur les canaux de signalement et les procédures alternatives, des conseils gratuits ainsi qu’un soutien juridique, financier et psychologique.

«Les scandales ‘Diesegate’ et ‘Panama Papers’ et les révélations dans l’affaire ‘Cambridge Analytica’ nous ont fait comprendre à quel point les lanceurs d’alerte aident à mettre au jour des activités illicites qui portent atteinte à la fois à l’intérêt public et à notre bien-être général, analysait ce matin Vĕra Jourová, commissaire pour la justice, les consommateurs et l’égalité des genres. Dès lors, il « nous appartient de soutenir et de protéger les personnes courageuses qui mettent en lumière des activités illégales, et, pour ces raisons, je suis heureuse que nous soyons parvenus à un système équilibré qui encourage les employeurs à résoudre les problèmes au niveau interne tout en permettant aux lanceurs d’alerte de se tourner vers les pouvoirs publics sans crainte de représailles».

Adopté en trilogue, l’accord provisoire devra, pour entrer définitivement en vigueur, encore être confirmé par les ambassadeurs des États membres (Coreper) et la commission des affaires juridiques du Parlement européen avant d’être mis aux voix de celui-ci dans son ensemble et du Conseil. Vingt jours après sa publication au Journal officiel de l’UE, la directive entrera ensuite en vigueur.

Photo: Mike Herbst sous licence creative commons