Pesticides: Le Parlement renvoie la Commission dans les cordes

«En nous opposant à des critères d’évaluation bien trop faibles relatifs à la dangerosité des pesticides pour les abeilles, nous avons voulu poser une question simple: sommes-nous sérieux à propos de la protection de l’environnement? Sommes-nous sérieux à propos de la protection du vivant? Sommes-nous sérieux avec le Green Deal? Le résultat est très clair: grâce à notre mobilisation, une très large majorité du Parlement européen n’a pas voulu d’une législation au rabais pour la protection des abeilles», a déclaré hier le président français de la commission de l’environnement Pascal Canfin (Renew Europe, FR), à l’issue du vote d’une résolution à la majorité absolue (533 voix pour, 67 contre et 100 abstentions), demandons à la Commission «de revoir sa copie et de présenter une législation qui écarte les pesticides les plus dangereux pour les pollinisateurs».

Le projet de proposition de la Commission européenne avait pour objectif d’introduire dans le droit européen les orientations de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) de 2013 afin de réduire l’utilisation de pesticides nuisibles aux abeilles. L’EFSA avait proposé que les pesticides soient testés pour protéger les abeilles à la fois contre une exposition aiguë et chronique. Les pesticides ne seraient restés disponibles sur le marché qu’en cas de réussite de ces nouveaux tests.

Toutefois, la plupart des États membres de l’UE se sont opposés à ces dispositions, forçant la Commission à trouver un compromis pour ne conserver que les dispositions qui protègent les abeilles contre une exposition aiguë. Ceci, quand bien même environ 84% des espèces cultivées et 78% des espèces de fleurs sauvages dépendent au moins en partie de la pollinisation animale, et que l’on estime que 15 milliards d’euros de la production agricole annuelle de l’UE peuvent être directement attribués aux insectes pollinisateurs.

«Il est totalement inacceptable que les États membres s’opposent à la mise en œuvre complète des orientations de l’EFSA de 2013», indique la résolution du Parlement adoptée mercredi. Le projet «introduit uniquement des modifications (…) concernant la toxicité aiguë à l’encontre des abeilles mais demeure silencieux sur la toxicité chronique, tout comme sur la toxicité à l’encontre des bourdons et des abeilles solitaires». Par ailleurs, le texte de la Commission «ne reflète pas les dernières évolutions des connaissances scientifiques et techniques» et «ne changerait pas le niveau de protection» déjà en place, affirme le texte.

Les députés ont également souligné que la Commission européenne n’aurait pas dû faire de concession et qu’elle aurait dû utiliser pleinement ses pouvoirs, les 16 États membres faisant obstacle à l’application des critères de protection ne formant pas une majorité qualifiée.

Photo: Pascal Canfin / Photographe: Melanie Wenger / © European Union 2019 – Source: EP