Migrants: Et déjà l'accord du Conseil semble voler en éclats

Moins d’une semaine après la conclusion d’un accord au Conseil européen des 28 et 29 juin sur la gestion des flux migratoires, celui-ci semble déjà en partie voler en éclats sous la pression de Horst Seehofer, chef de file du parti conservateur bavarois CSU et ministre de l’Intérieur d’Angela Merkel.

Suite à un énième bras de fer avec la cheffe de l’exécutif berlinois, celui-ci a en effet obtenu la nuit dernière que soient instaurés des «centres de transit» à la frontière entre l’Allemagne et l’Autriche, écartant toute possibilité pour les demandeurs d’asile d’être désormais répartis dans des foyers à travers le territoire le temps que leur dossier soit examiné et leur renvoi vers les pays où ils ont été enregistrés en premier à leur arrivée dans l’Union entériné. Autre termes du compromis Merkel – Seehofer: le projet de refouler vers l’Autriche les demandeurs d’asile arrivant en Allemagne qui ne peuvent être renvoyés vers leur pays d’entrée dans l’Union, pour peu qu’un accord administratif puisse être conclu en ce sens entre Berlin et Vienne. Un scenario peu probable, le gouvernement autrichien menacé quelques heures à peine après cette annonce de «prendre des dispositions similaires et refouler à ses frontières sud les demandeurs d’asile», avec pour risque la mise en place d’un «effet domino» en Europe.

Loin de la solidarité européenne officiellement retrouvée fin de semaine dernière, ce nouvel épisode dans la gestion des demandeurs d’asile en Europe renvoie directement à l’analyse du texte de l’accord du Conseil européen publiée vendredi dernier par la Délégation socialiste française (DSF) au Parlement européen. Intitulé «Conseil européen, migrations: Bon d’accord! Mais alors, qui est volontaire?», celui-ci soulevait notamment le point suivant: «Accord sur une distribution volontaire des demandeurs d’asile et des réfugiés au sein de l’UE. Très bien mais c’est justement l’aspect volontariat qui a échoué jusqu’à présent».

Concluant sa lecture de l’accord du Conseil, la DSF ajoutait: «Pour résumer, sans rien régler sur le fond, des gages ont été donnés aux Etats membres les plus remontés: l’Allemagne obtient la possibilité de refouler les Dublinés (via les mesures internes pour lutter contre les mouvements secondaires); l’Italie peut gérer son ministre de l’Intérieur en déclarant se sentir moins isolée et en refusant d’ouvrir des centres d’accueil; la France fait le chef d’orchestre sans prendre l’ombre d’un engagement; Visegrad échappe à la solidarité et à la pénalisation».

Moins d’une semaine après, les «Etats membres les plus remontés» semblent, au vu des derniers événements, gagner encore davantage de terrain. Resterait, si l’effet domino devait encore s’accentuer, comme dernière option le consensus obtenu sur les plateformes de désembarquement. Mais, là encore, l’analyse des élus socialistes français pourrait renvoyer l’Union à une autre réalité: celle qu’«en matière de mise en œuvre juridique et géographique, aucun pays tiers n’est volontaire sur cette proposition».

 

Photo: Rasande Tyskar sous creative commons