Hongrie: Bruxelles envoie Budapest devant la Cour de justice de l'Union

La Commission européenne a décidé aujourd’hui de former un recours contre la Hongrie devant la Cour de justice de l’Union européenne pour non-conformité de sa législation en matière d’asile et de retour avec le droit de l’Union. Motivations invoquées : en matière de procédures d’asile, la procédure aux frontières mise en œuvre par la Hongrie «n’est pas conforme au droit de l’Union car elle ne respecte pas la durée maximale de 4 semaines pendant laquelle une personne peut être retenue dans un centre de transit et ne prévoit pas de garanties particulières en faveur des demandeurs vulnérables», indique-t-on du côté du Berlaymont. De même, «sur son territoire, la Hongrie n’assure pas un accès effectif aux procédures d’asile étant donné que les migrants en situation irrégulière sont raccompagnés par-delà la frontière, même s’ils souhaitent introduire une demande d’asile». Concernant les conditions d’accueil, la Commission considère également «que la rétention illimitée des demandeurs d’asile dans des zones de transit sans respecter les garanties procédurales applicables enfreint les règles de l’Union définies dans la directive sur les conditions d’accueil». Enfin, ajoute-t-elle, la législation hongroise n’est pas davantage conforme à la directive «retour» de l’Union «car elle ne garantit pas que les décisions en matière de retour sont prises sur une base individuelle et contiennent des informations sur les voies de recours. En conséquence, les migrants risquent d’être renvoyés sans les garanties appropriées et en violation du principe de non-refoulement».

Parallèlement, à ce recours, Bruxelles a également annoncé avoir lancé une seconde procédure contre Budapest et. le gouvernement du Premier minsitre Victor Orban, cette fois par lettre de mise en demeure, suite à la récente adoption de la législation «Stop Soros» qui «érige en infraction pénale toute assistance offerte par toute personne pour le compte d’organisations nationales, internationales et non gouvernementales à des personnes qui souhaitent introduire une demande d’asile ou de permis de séjour en Hongrie». Cette législation «comprend également des mesures qui restreignent les libertés individuelles, en empêchant toute personne faisant l’objet d’une procédure pénale au titre de cette législation d’approcher les zones de transit aux frontières hongroises où les demandeurs d’asile sont retenus», s’est également inquiété la Commission. «Les sanctions vont d’une détention temporaire à une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 1 an et à l’expulsion du pays. En outre, la nouvelle législation et une modification constitutionnelle ont instauré de nouveaux motifs pour déclarer une demande d’asile irrecevable, en limitant le droit d’asile aux seules personnes qui arrivent en Hongrie directement depuis un lieu où leur vie ou leur liberté sont menacées».

Au titre des principales inquiétudes suscitées par le texte quant à sa compatibilité avec le droit de l’Union : l’érection en infraction pénale du soutien aux demandes d’asile et de séjour et les mesures restrictives connexes restreignent le droit des demandeurs d’asile de communiquer avec les organisations nationales, internationales et non gouvernementales concernées et d’être assistés par ces organisations, «ce qui enfreint la directive sur les procédures d’asile et la directive sur les conditions d’accueil» ; la restriction «de manière excessive (de) l’exercice des droits de libre circulation des citoyens de l’Union sans tenir dûment compte des garanties procédurales ou des droits des personnes concernées, ce qui enfreint l’article 20 et l’article 21, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) et la directive sur la libre circulation, ainsi que la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne»; l’introduction d’un nouveau motif d’irrecevabilité pour les demandes d’asile, non prévu par le droit de l’Union.

Concernant les griefs invoqués dans cette lettre de mise en demeure – première étape d’une procédure d’infraction pour violation du droit de l’Union -, Budapest dispose de deux mois pour répondre aux préoccupations exprimées par la Commission.

 

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