Affaire Kavala: Une condamnation qui «défie de manière flagrante la CEDH»

«Choqués» : c’est le terme employé par John Howell (Royaume-Uni, CE/DA) et Boriss Cilevics (Lettonie, SOC) à l’issue de leur visite de trois jours à Istanbul et Ankara consacrée à l’affaire Osman Kavala – accusé d’avoir tenté de renverser le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan lors du putsch raté de juillet 2016. Au cœur de l’émoi des deux corapporteurs pour le suivi de la Turquie par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, la condamnation à perpétuité aggravée prononcée à l’encontre du philanthrope le 25 avril 2022, qui, selon eux, «défie de manière flagrante l’arrêt rendu en 2019 par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH)». Une non-application de cet arrêt qui a incité le Comité des ministres du Conseil de l’Europe à lancer une procédure d’infraction en février 2022, qui est en cours.

«A la suite de nos réunions fructueuses de ces derniers jours, nous avons entendu les arguments juridiques des deux parties. Cependant, il nous semble clair que des éléments jugés insuffisants par la Cour de Strasbourg pour justifier ne serait-ce qu’une détention provisoire ont néanmoins servi de base à la condamnation la plus sévère possible en première instance. Cela équivaut à un mépris manifeste des conclusions de la Cour européenne des droits de l’homme. Nous pensons que l’arrêt de la Cour s’applique également à l’acte d’accusation ultérieur pour lequel il a été réarrêté», commentent John Howell et Boriss Cilevics.

Selon les deux rapporteurs, la condamnation de sept coaccusés dans le procès de Gezi – dont le directeur de l’Ecole d’études politiques du Conseil de l’Europe et d’éminents militants de la société civile – à de lourdes peines de prison, et leur emprisonnement immédiat, est également très préoccupante, même s’ils concèdent que, «tant que le jugement n’est pas définitif, ces personnes restent détenues et ne sont pas définitivement condamnées». Un petit espoir, pour les prévenus, qui selon les deux rapporteurs ont désormais leur avenir entre les mains de la justice turque «qui a la capacité de trouver une solution juridique conforme à l’arrêt de Strasbourg – dans le respect du droit international, et obtenue sans pression politique ni ingérence indue».