Gagner le pari de la mondialisation: oui mais comment?

Dans le cadre de la réflexion sur l’avenir de l’Europe, la Commission européenne publiait en mai dernier un document de réflexion intitulé «Maîtriser la mondialisation». L’objectif : définir les contours d’une politique économique, sociale et éducative susceptible d’inscrire durablement l’Union européenne comme un acteur gagnant de la globalisation, face à des puissances comme la Chine. Invité des Europ’After Hours de l’ENA, Françoise Grossetête (PPE), insiste sur l’urgence de la situation et appelle à une politique véritablement ambitieuse en ce domaine, élargie, également, aux territoires ruraux.

« 75 millions d’achats transfrontaliers, 2 millions de travailleurs transfrontaliers et 3.3 millions d’étudiants partis en mobilité grâce à ERASMUS + ». En quelques chiffres, la députée européenne Françoise Grossetête, rattache la mondialisation au quotidien. Des chiffres, poursuit-elle, auxquels l’on pourrait ajouter le fait que « l’Union européenne est également la premier pourvoyeur d’aide au développement, une des plus grandes économies mondiales et le plus grand marché unique au monde ». Les nombreux défis liés à la mondialisation sont : l’emploi, les politiques sociales, les accords commerciaux internationaux… Pour l’élue française, « ces problématiques nécessitent une réponse des Etats-membres et de l’Union européenne afin de peser conjointement au niveau mondial. En 2025, l’Union européenne ne représentera plus qu’une infime part de la population mondiale, largement devancée par le continent asiatique ».

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Une politique commerciale extérieure plus responsable

Ce point de vigilance n’est pas nouveau : déjà, le 16 mai dernier, alors que la Commission européenne publiait un document de réflexion sur «La maîtrise de la mondialisation», Françoise Grossetête sonnait l’alerte depuis l’enceinte du Parlement de Strasbourg. Si celle-ci accueillait alors favorablement le texte de l’exécutif européen, elle n’en regrettait pas moins un certain manque d’ambition ; insistant notamment sur la nécessité d’être plus intransigeant dans les accords internationaux. Elle pointait en particulier du doigt la question du respect des normes sociales et sanitaires plus élevées au sein de l’Union européenne que dans d’autres ensembles concurrents. Elle désignait aussi l’absence de mise en œuvre d’un réel contrôle des investissements étrangers, seul moyen de protéger efficacement les intérêts européens. Si l’on prend l’exemple de l’acier, l’Allemagne, rappelle-t-elle, a ainsi subi une concurrence très forte de la Chine mais n’a pas hésité mobiliser à l’échelle de l’Union et à faire adopter des règles antidumping pour contrer les industriels chinois, prouvant ainsi qu’avec un minimum de volonté politique des mesures fortes pouvaient être mises en place pour protéger l’économie européenne. La Commission européenne semble vouloir aujourd’hui aller dans ce sens.

Repenser les politiques d’enseignement et de formation

Si sur le plan social et éducatif des mesures sont également préconisées par la Commission pour répondre au défi de la mondialisation, Françoise Grossetête n’en insiste pas moins sur l’urgence qu’il y a à agir, en prenant plus particulièrement le tournant du numérique à sa juste mesure. Citant un rapport de l’OCDE sur l’éducation et le numérique, elle en appelle à une éducation résolument plus dirigée vers les outils digitaux en les rendant accessibles à l’ensemble des citoyens, dès le plus jeune âge. Ceci, afin que les actifs européens ne se voient progressivement écartés du marché du travail, faute de formation adéquate. Une autre préoccupation de la députée, faisant cette fois pleinement écho aux recommandations de la Commission européenne est de propager le dynamisme des villes à tout le territoire pour ne pas désavantager « les oubliés de la mondialisation » – à commencer par les territoires ruraux – et que ne se creuse davantage, encore, le fossé déjà existant entre « nomades créatifs » et « néo-sédentaires » dépeint en France par le sociologue Jean Viard.

Inévitablement, la mise en forme de telles politiques aura un coût non négligeable : 1 milliard d’euros investis dans l’Union européenne pour 14 000 emplois supplémentaires, dont 1/7 dépendant de la capacité de l’Union à conforter sa puissance exportatrice à l’international. Mais elle est, conclut, Françoise Grossetête, un enjeu majeur pour que les Européens profitent des bénéfices de la mondialisation tout en voyant décroître ses effets néfastes.

À propos de l’auteur : Clara Grubain est diplômée en droit de l’Union européenne à l’Université de Strasbourg.
Crédits photo: Benjamin Géminel sous creative commons

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