Intelligence artificielle: «Notre future compétitivité dépend des règles que nous mettons en place aujourd’hui»

Ce mardi, après 18 mois d’enquête, la commission spéciale du Parlement sur l’intelligence artificielle à l’ère numérique (AIDA) a adopté ses recommandations finales. Le texte adopté affirme que le débat public sur l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) devrait s’orienter sur le potentiel énorme qu’offre cette technologie en matière de développement pour compléter l’homme. Il avertit que l’UE est en retard dans la course mondiale pour être leader en matière technologique. En conséquence, les prochaines normes risquent d’être développées ailleurs, souvent par des acteurs non démocratiques, tandis que l’UE doit agir en tant que créateur de normes au niveau mondial en matière d’IA.

Les députés ont identifié différentes options politiques pour libérer le potentiel de l’IA dans les secteurs de la santé, l’environnement et le changement climatique, la lutte contre les pandémies et la famine dans le monde, et pour améliorer la qualité de vie via des médicaments personnalisés. L’IA, si elle est combinée avec les infrastructures de soutien nécessaires, l’éducation et la formation, peut augmenter la productivité en matière de capital et de travail, l’innovation, la croissance durable et la création d’emplois, ajoutent-ils. L’UE ne devrait pas toujours règlementer l’IA comme une technologie. Le niveau d’intervention règlementaire devrait au contraire être proportionné au type de risque associé à un usage particulier d’un système d’IA.

Le projet de texte souligne également que les technologies d’IA pourraient soulever de sérieuses questions éthiques et juridiques. Il insiste aussi sur le défi qui consiste à aboutir à un consensus au sein de la communauté mondiale sur les normes minimales pour un usage responsable de l’IA, et s’inquiète de la recherche et des développements militaires sur des systèmes d’armes létales autonomes. Les députés estiment que certaines technologies d’IA permettent d’automatiser le traitement de l’information à une échelle sans précédent, ce qui ouvre la voie à la surveillance de masse et à d’autres ingérences illégales et constitue une menace pour les droits fondamentaux, en particulier le droit à la vie privée et à la protection des données. Des régimes autoritaires utilisent des systèmes d’IA pour contrôler, exercer une surveillance de masse et classer leurs citoyens, ou pour restreindre leur liberté de mouvement. Les plateformes technologiques dominantes les utilisent pour obtenir plus d’informations sur un individu. Un tel profilage présente un risque pour les systèmes démocratiques ainsi que pour la sauvegarde de nos droits fondamentaux, précisent les députés.

«Dans ce rapport, nous démontrons clairement que l’IA sera un moteur pour la numérisation et un facteur de changement dans la concurrence numérique mondiale, et notre feuille de route positionne l’UE en tant que leader en la matière», a relevé le rapporteur Axel Voss (PPE, DE). L’UE a maintenant la chance unique de promouvoir une approche de l’IA centrée sur l’humain, fiable et respectueuse des droits fondamentaux, qui gère les risques tout en profitant pleinement des avantages qu’offre l’IA à l’ensemble de la société. Nous avons besoin d’un cadre juridique qui laisse la place à l’innovation, d’un marché unique numérique avec des normes claires, d’investissements massifs et d’infrastructures solides et durables accessibles à tous les citoyens».

Pour le président de la commission AIDA, Dragoş Tudorache (Renew Europe, RO), « notre future compétitivité au niveau mondial dans le domaine numérique dépend des règles que nous mettons en place aujourd’hui. Ces règles doivent être conformes à nos valeurs: la démocratie, l’Etat de droit, les droits fondamentaux et le respect de l’ordre international fondé sur des règles. C’est primordial, alors que la lutte entre l’autoritarisme et la démocratie devient de plus en plus intense, et malheureusement plus meurtrière, comme en témoigne l’invasion injustifiée de l’Ukraine par la Russie».

Adopté en commission parlementaire par 25 voix pour, 2 contre et 6 abstentions, le rapport sera mis aux voix en plénière en mai.