COP26: La Grande Muraille Verte, priorité 2022?

Longtemps considérée comme un programme de plantation d’arbres, l’initiative de la Grande Muraille Verte (GMV), a refait surface en ouverture de la COP26 de Glasgow, par l’entremise d’une adresse de la Présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen envers le Président Français Emmanuel Macron et le Président de la République islamique de Mauritanie Mohammed Ould el-Ghazouani.

«Approuvée en 2007 par l’Union africaine (UA), la Grande Muraille verte est l’une des premières initiatives internationales sur l’environnement et la gestion des terres, qui rassemble des pays africains et des partenaires internationaux», relève t-on du côté du ministère français des affaires étrangères. Onze Etats en sont directement parties: le Sénégal, la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger, le Nigeria, le Tchad, le Soudan, l’Érythrée, l’Éthiopie et Djibouti. «Conçu pour lutter contre les effets du changement climatique et de la désertification en Afrique, ce projet vise à restaurer, d’ici 2030, 100 millions d’hectares de terres dégradées dans les 11 pays de la bande soudano-sahélienne, de séquestrer 250 millions de tonnes de carbone (soit l’équivalent et du volume éliminé en 2018 par l’ensemble des forêts et des terres situées dans l’Union européenne), et de créer 10 millions d’emplois verts».

Si cette initiative devait se concrétiser d’ici cette échéance, relevaient le 21 juin dernier à l’occasion d’une question parlementaire plusieurs députés européens membres du Groupe Renew, la GMV «pourrait transformer l’une des régions les plus pauvres du monde et préserver les populations d’une migration forcée en créant une mosaïque d’écosystèmes verts au moyen d’une approche systémique: lutte contre la désertification et la sécheresse, développement d’infrastructures durables, création d’emplois et amélioration de la sécurité alimentaire». Or, notaient ces derniers, pour l’heure, «seuls 4 % des objectifs ont été atteints», alors que lors du sommet «One Planet» de janvier dernier, un soutien financier international d’environ 12 milliards d’euros d’ici à 2025 a été annoncé, dont 700 millions d’euros annuels émanant de l’UE, sans que ne se dégage véritablement de vision stratégique européenne pour surmonter les difficultés posées par le projet de GMV, notamment l’absence de registres fonciers dans les pays concernés.

Dans une réponse apportée le 17 août dernier par Mme Urpilainen au nom de la Commission européenne, était alors précisé que «le soutien de l’UE s’exprimera à travers la stratégie intégrée de l’Union européenne au Sahel et la stratégie dite de l’accélérateur, développée par les pays de la grande muraille verte et leurs partenaires afin de renforcer et de mieux coordonner la réalisation de la grande muraille verte tout en améliorant le suivi et la mesure de son impact». Poursuivant, le Berlaymont ajoutait que «bien que les programmes indicatifs pluriannuels 2021-2027 pour les 11 pays de la grande muraille verte soient encore en cours de finalisation, des actions nationales sont prévues, encourageant l’agro-écologie, les chaînes de valeur verte, la préservation de la biodiversité, la gestion durable des terres et les infrastructures durables en matière énergétique ou résilientes face au changement climatique; elles devraient contribuer à la réalisation des objectifs de la grande muraille verte». «L’assistance accordée par l’UE sera (dès lors) adaptée au contexte local et s’inscrira dans le cadre d’initiatives de développement durables, intégrées et inclusives, élaborées en collaboration avec les pays partenaires et prenant racine dans les communautés et les politiques locales (…) Lorsque ce sera possible et adéquat, les actions seront menées en application de l’approche dite de l’équipe d’Europe, dans le but d’unir les forces et de mobiliser des ressources supplémentaires».

Précisant le contenu de cette récente sortie politique, Ursula Von de Leyen s’est, cette fois, depuis Glasgow, engagée – sans néanmoins en préciser le montant exact – à ce que l’UE mobilise davantage de fonds encore que les 700 millions d’euros annuels, et à collaborer «avec nos partenaires africains pour faire de cette initiative une réalité». Quelque peu plus précise, la Présidente de la Commission a enfin annoncé que la GMV «sera une priorité essentielle du sommet UE-Union africaine qui se tiendra en février 2022» et qu’une «série d’initiatives qui forment une mosaïque d’actions en soutien à la Grande muraille verte» étaient actuellement étudiées. Soutien aux communautés locales, dans la réhabilitation de l’environnement et l’inversement du processus d’appauvrissement de la biodiversité, gestion durable des terres pour répondre aux besoins de développement des populations africaines croissantes, lutte contre la dégradation des sols pour garantir la sécurité alimentaire et protéger les moyens de subsistance de millions de personnes en seront les principaux piliers.

Appelée de ses vœux par le Président français Emmanuel Macron, ce projet aux contours encore relativement flous pourrait toutefois rapidement gagner en clarté et efficacité dans les prochains mois, alors que Paris prendra la présidence de l’UE au premier semestre prochain, justement alors que se profilera le sommet UE-Union africaine en février 2022. Pour l’heure, reste à attendre si les grandes déclarations de la COP 26 seront effectivement suivies d’effets à court terme et prendront effectivement des airs de réalité.